Voyage au pays de l’intelligence collective – Épisode 15 : L’Appreciative Inquiry, une approche participative à rebours de la culture française

D’origine américaine, l’Appreciative Inquiry (« Investigation Appréciative ») est une approche managériale qui vise à mobiliser, de façon participative, les forces vitales de l’organisation qui engageront les transformations nécessaires à son évolution.

Elle repose sur l’art de poser des questions inconditionnellement positives lors d’interviews des membres de l’organisation, invités à projeter leur vision d’avenir de l’organisation à partir des réalisations passées qui les ont les plus marqués.

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La méthode originale comprend 5 étapes

Les 5D : Definition, Discovery, Dream, Design, Destiny.

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1- Définition (Clarification : « What is the focus ? ») : C’est la définition de la « zone » d’exploration, ce qu’il est souhaitable de voir changer (ex.: la coopération, l’esprit d’équipe, les relations clients, l’esprit d’entreprise, le fonctionnement transverse, etc.). Cette étape est cruciale car elle constitue la base pour les suivantes. Elle est le résultat d’une réflexion menée au sein d’un comité de pilotage ad hoc, ou plus largement, avec des représentants des équipes concernées. Elle est toujours formulée positivement.

2- Découverte (Appréciation : « The best of what is ») : C’est le moment de la valorisation de ce qui existe dans l’organisation. Des questions sont posées individuellement aux cibles visées (par exemple au sein d’un département de l’organisation, de quelques équipes, des managers, d’une partie du personnel, …), centrées sur leurs expériences positives passées, en lien avec le thème de l’exploration défini lors de l’étape précédente (« Ce qui donne vie à l’organisation »).

Un rassemblement collectif permet au groupe cible d’échanger sur les meilleures expériences et les succès vécus par chacun(e) (par paires, puis en sous-groupes, et enfin en plénière). A partir de ces échanges, les participants découvrent collectivement leurs forces et leurs atouts, celles de leur équipe, de leur département, de leur organisation, leurs valeurs et croyances communes, les éléments qui les fédèrent. C’est souvent un grand moment de découverte partagée.

3- Rêve (Vision : « What might be ») : C’est la phase de projection « dans le meilleur des possibles ». Cette phase génère beaucoup de créativité et peut se manifester sous de multiples formes (dessins, sculptures, chants, etc.). Ce rêve peut être formalisé par des propositions « challengeantes » pour l’organisation (« Ce que le monde nous appelle à aller chercher »).

4- Design (Conception : « What should be ») : C’est la phase de conception de ce qui pourrait être = la mise en œuvre de la vision précédemment élaborée. Les personnes construisent collectivement, en mode co-construction, ce qui « devrait être » dans l’organisation. Ils conçoivent ensemble le plan de mise en œuvre de la vision : la définition des parties prenantes, des leviers de changement, les actions concrètes à mener, etc…

5- Destin (Déploiement : « How to empower, learn, adjust, improve ») : C’est la phase de mise en œuvre opérationnelle avec les équipes, qui permet de déployer collectivement le plan d’action en tirant partie de l’énergie positive qui irrigue la démarche. Durant cette phase, c’est aussi le moment d’apprendre collectivement, en allant chercher les moyens d’améliorer l’existant et en ajustant le processus entamé.

Pourquoi cette démarche fonctionne ?

Parce qu’elle met en jeu un certain nombre d’éléments essentiels de motivation individuelle :

  • Être écouté(e) dans l’organisation, dans une démarche collective et y être reconnue(e) en tant que partie prenante ;
  • Être positif, regarder ce qui va bien dans l’organisation, le verre à moitié plein vs à moitié vide, à rebours de notre culture française ;
  • Se projeter sur une organisation différente demain, meilleure qu’aujourd’hui ;
  • Contribuer à une évolution de l’organisation proposée de manière participative, à partir du terrain, en mode intelligence collective, vs chercher à résister à un changement si souvent imposé par le haut.

L’Appreciative Inquiry se distingue de l’approche traditionnelle de « résolution de problèmes » par une vision différente de l’organisation.

Dans l’approche « résolution de problèmes », l’analyse des causes d’un problème (en vue d’identifier les solutions adéquates) isole l’organisation en sous-systèmes pour mieux l’appréhender.

Les solutions, et par conséquent les résultats, sont donc souvent fragmentaires.

En outre, se concentrer sur les problèmes ne facilite pas l’établissement de relations constructives. Au contraire, cela risque de favoriser les comportements défensifs.

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L’Appreciative Inquiry, à l’inverse, part des représentations positives construites des membres de l’organisation, pour envisager des solutions globales, de manière systémique.

La réalité de chacun étant une « construction », élaborée à partir de ses interprétations subjectives (principe « constructionniste » cf. « Du désir au plaisir de changer », de Françoise Kourilsky – Dunod 2014), notre présent et notre futur sont donc fonction du sens que nous donnons aux choses qui nous entourent : sens qui reste à construire.

L’expérience montre que, si nous sommes invités, en tant que membres d’une organisation, à projeter ensemble un avenir commun positif, à partir de vécus eux-mêmes positifs, nous allons faire tout notre possible pour faire advenir cette réalité que nous aurons co-construite.

Appreciative Inquiry de David Cooperrider et Diana Whitney ; Edition Française 2016 – InterEditions

Et vous, c’est quand votre prochaine expérience d’Appreciative Inquiry ?